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Ça a commencé en primaire, où étant le souffre-douleur de la classe, j'avais envoyé un bon gros pain dans la tronche de la peste meneuse qui me harcelait. Aucune punition à mon encontre de la part de la maîtresse qui connaissait la situation. Mais à la maison... Lynchage de ma mère qui était horrifiée que j'ai pu être aussi "agressive", "violente", "une tigresse sauvage et barbare" et qu'elle ne laisserait pas sa petite fille devenir "un petit mec".

Plus tard, quand vînt l'heure de grandir pour devenir une femme, ce fût l'éducation au maquillage, aux soins du corps, à l'épilation, au shopping pour être "belle". Chaque matin en débarquant au petit déjeuner c'était l'inquisitrice qui me passait en revue pour vérifier si j'étais "présentable". Et chaque matin ça n'allait pas: "oh non, pas ce pantalon, il moule tes grosses fesses. Quand on a des hanches comme toi, on met des jupes ou des pantalons évasés, pas de slim qui boudine". "Ah non, pas de t-shirt, mets un chemisier ou ce petit haut qui cache tes seins. C'est trop vulgaire quand on en a trop. Quel message penses-tu renvoyer aux autres?". "Pas maquillée? Mais tu as tous les éléments pour être jolie, mais tu ne fais rien pour prendre soin de toi, c'est tellement dommage".

Au moment des repas: "Ah non, ça tu n'en as pas besoin. Tu as trop mangé à midi. Tu dois encore perdre 10 kg. Quand on a une nature comme la nôtre, il faut faire attention sinon tu enfles vite. Regarde, moi par exemple. Si je en faisais rien je serais comme toi".

Et surtout... "Rases-moi ça. C'est une honte ces aisselles. On se croirait en Allemagne de l'Est. Tu n'es pas un garçon." "Voilà, là c'est bien, tu as de si jolies jambes, pourquoi tout gâcher avec une épilation imparfaite? C'est lisse, c'est glabre, c'est doux, c'est fin, c'est féminin..." Alors tous les soirs, pince à épiler pour enlever les poils imparfaits qui poussent pendant les 2 semaines qui séparaient mes séances d'épilation.

Et lors de mes premiers râteaux au collège avec les garçons de ma classe "Mais tu leur fais trop peur, tu es trop impressionnante. Il ne faut jamais faire le premier pas! Combien de fois t'ai-je dit de te taire? Parle moins, parle mieux. Une femme se doit d'être douce et diplomatique. Tu es trop directe, bien sûr qu'ils ne veulent pas de toi. ça fait bourrine."

Puis lorsque je voulais faire du jogging: "Ah mais non, ne sors pas toute seule, c'est trop dangereux, il y a trop d'accidents et de jolies jeunes filles comme toi qui disparaissent". Pendant que mon frère courrait 1h tous les soirs allègrement, faisait les 6km jusqu'à l'école à vélo tous les jours... Tout seul, dès 12 ans.

Puis vint le premier copain: "Ah non, fais attention, que t'ai-je dit sur les hommes: c'est dans leur nature, ils ont besoin de tirer leur coup. La seule façon de te faire respecter c'est de dire non et de faire attendre. Une fille trop facile et accessible se fait toujours jeter après avoir été consommée."

Ce formatage a duré 18 ans. Jusqu'à ce que je sois indépendante et adulte. Mais le chemin a été très long et très difficile pour annihiler les angoisses qu'on m'avait inculquées viscéralement. parce que oui, une jeune femme est par nature fragile et donc on a besoin d'un homme fort pour nous protéger dans la vie. On ne peut pas vivre sans eux. Et la femme est la garante de leur vertu, eux qui sont bourrés de testostérone et ne peuvent pas toujours contrôler leurs pulsions. Bah oui, les pauvres. Faut les comprendre. Et puis, un homme, ça a des poils, ça sue, ça a des muscles, ça mange ce que ça veut, ça s'habille pratique parce qu'affronter les dangers de la vie quotidienne leur revient pour nous protéger nous, petites choses précieuses et fragiles. Et un homme ça sent fort. ça a le droit de puer, bah oui c'est les hormones... Leurs parfums sont donc forts, c'est hmmmm viril!

Alors non, j'ai décidé de ne pas être une femme. Ni une humaine d'ailleurs, vu ce qu'ils font sur la planète.

Je préfère être vraie, quitte à être un animal. Quand j'ai faim je mange. Quand j'ai soif je bois. Quand je suis attirée émotionnellement et physiquement vers quelqu'un, je vais vers lui. Quand on m'agresse je me défends. Quand on me parle je réponds ce que je pense. Quand je suis fatiguée ou heureuse je laisse mon visage avec ses marques libres, qui pleure et rit. Sans se soucier du maquillage qui, oh mon dieu! pourrait couler et s'enlever si je me frotte les yeux parce ça me gratte.

Et surtout, je laisse mes magnifiques poils qui recouvrent mon corps pousser. Je ne cherche plus à faire de cure anticellulite, sachant que 95% des femmes en ont et même les stars qui s'affament et passent sur le billard en ont (merci Closer!). C'est hor-mo-nal...

Ma peau est apaisée, mon pubis et mes aisselles ne saignent plus et ne me brûlent plus lorsque je sors de chez Yves Rocher. Plus de plaques rouges qui durent 2 jours sur les jambes desséchées que je dois hydrater en permanence quand ils sont privés de leurs poils avec leurs glandes sébacées à la base des follicules pileux qui assurent naturellement la transpiration et l'hydratation de la peau.

Mes poils sont un cri de guerre. Une déclaration au monde que je le laisserai plus jamais faire du mal à mon corps. On a bannit les corsets, mais ils sont toujours d'actualité: ils sont psychologiques, ils sont cosmétiques, ils sont publicitaires, ils sont médiatiques. Ces carcans qui font que quasi toutes les femmes sont névrosées plus ou moins consciemment par rapport à leur corps, leur poids, leur alimentation, leur confiance en soi, leurs complexes, leurs ambitions, leurs désirs, leur bonheur... Leur liberté.
Une femme pense 20 à 30 fois par minute à corriger et surveiller son apparence, ses postures, ses cheveux, son maquillage, ses vêtements.

Les vêtements devraient être un plaisir amusant pour exprimer ses goûts personnels et non pour "avoir l'air bien". L'épilation ou le rasage devrait être faits (ou pas faits) comme un choix personnel de modification corporelle (retrouvée dans toutes les civilisations). Comme un tatouage, un piercing, une coloration de cheveux...
Le maquillage devrait aider à révéler la beauté des femmes et non servir de masque pour être "présentable".

Rappelez-vous que si l'on veut plaire et séduire (à qui et pourquoi?), c'est en se plaisant à soi-même d'abord.

Donc oui, mes chers petits poils, je vous aime!!!

Cambridge

Je ne suis plus une femme